Le télégramme de l'armistice

Le télégramme de l’Armistice

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A 11 heures du matin le 11 novembre 1918, l’Armistice signé aux petites heures du jour à Rethondes entra en vigueur et marqua la fin officielle des combats de la Première Guerre mondiale en France. Par télégramme, le ministère de l’Intérieur transmit la nouvelle aux préfets, chargés de relayer l’information sur le territoire.

Quelques exemplaires du message ainsi envoyé aux 691 communes de Seine-et-Oise sont conservés aux Archives départementales du Val-d’Oise :

« Veuillez dès maintenant prendre toutes dispositions pour qu’à 4h30 cet après-midi sauf avis contraire les cloches de toutes les églises de toutes les villes, de tous les villages, de tous les hameaux sonnent à toute volée à la même heure. Veuillez faire pavoiser et illuminer tous les édifices publics aux couleurs alliées. Mettez-vous en outre d’accord dès maintenant avec [les] autorités militaires pour qu’à 4h30 sauf avis contraire des salves d’artillerie soient tirées [au maximum]. »

Joseph Canal, préfet de Seine-et-Oise

Le document présenté a été déposé à 11h13. Nous ne disposons pas du télégramme reçu par le préfet de Seine-et-Oise, Joseph Canal ; toutefois, des documents similaires conservés dans d’autres services d’archives départementales attestent d’une transmission du ministère aux préfets à 12h 301. Par ailleurs, si la mention d’un horaire – 16h30 – pour organiser les réjouissances figure dans une note du ministère aux préfets conservée aux archives de Bordeaux Métropole2, elle n’apparaît pas sur les télégrammes consultés. Joseph Canal, nommé directeur du personnel au ministère de l’Intérieur dès janvier 1919, disposait-il de contacts lui ayant permis de diffuser précocement la nouvelle aux communes ?

En dehors de ce détail, le texte reprend mot pour mot celui émanant du ministère, ce qui ne fut pas le cas partout : à Langan (Ille-et-Vilaine), le maire reçut un laconique : « Armistice signé – Hostilités suspendues à midi (sic) – Pavoiser et sonner les cloches »3. Ailleurs, le passage concernant les salves d’artillerie fut souvent omis et remplacé par des envolées patriotiques !4

La nouvelle se répand

Les instructions du préfet furent-elles suivies ? De façon générale, les nombreux témoignages relatifs à cette journée font ressortir le caractère spontané des manifestations de joie et ce, dès le matin. Dans Le Journal d’Argenteuil du 17 novembre 19185, on lit : « Peu d’instants après l’heure fixée pour la cessation des hostilités, M. Defresne-Bast, maire, faisait placarder [une affiche] sur les murs pour inviter les habitants à illuminer et pavoiser leurs demeures […] ». Mais aucun rassemblement au son des cloches et des canons n’est mentionné dans le compte-rendu.

L’Echo pontoisien du 14 novembre 19186 évoque bien « à 4 heures et demie, une manifestation grandiose [...] spontanément organisée. Des milliers de personnes […] se réunirent sur la place de l’hôtel de ville. » Toutefois les scènes de liesse avaient débuté dès 11 heures et un feu d’artifice fut tiré à la place des salves d’artillerie préconisées.

Le télégramme adressé aux communes de Seine-et-Oise le « 11-11-18 » resta sans doute un moyen secondaire d’informer la population. Il n’en fit certainement pas moins trembler d’émotion les petites mains chargées de transmettre et de réceptionner son contenu…

Roselyne Chapeau, service des Archives communales et de l’Inventaire du patrimoine
Direction des Archives départementales du Val-d’Oise
Octobre 2018

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Sources 

1. Note du ministère de l’Intérieur annonçant l’Armistice, Archives d’Orléans Métropole. [1 J 336]

2.Télégramme du ministère de l’Intérieur aux préfets, Archives départementales du Cantal, 18 Num 37, et Archives départementales de l’Yonne. [7 R 159]

3.Télégramme du préfet au maire, Archives communales de Langan. [4 H 10]

4. Voir notamment le télégramme conservé aux Archives départementales de la Haute-Loire. [3 Num 120]

5. Le Journal d’Argenteuil, 17 novembre 1918. ADVO [PER 464/14]

6. L’Echo pontoisien, 14 novembre 1918. ADVO. [PER 135/19]

Bibliographie

ALARY, Eric, La grande guerre des civils  1914-1919 . Paris :  Perrin, 2013, 455 p.[BIB 8/5809]

BECKER, Jean-Jacques, La Première Guerre mondiale. Paris : Belin, 2003, 367 p.[BIB 8/5781]

Journal de Joséphine Lassire, institutrice d’Argenteuil installée à Carolles (Manche) au moment de l’Armistice [43 J 13].

Sitographie

Dans la revue Siècles-Cahiers du Centre d’histoire « Espaces et Cultures », disponible en ligne :
article d’Aline Fryszman intitulé « Exultation festive et tristesse le 11 novembre 1918 : les paradoxes de la victoire dans le département du Puy-de-Dôme ». Consulté le 16/07/2018. (lien https://journals.openedition.org/siecles/2874 )