L'ostension de la Sainte Tunique à Argenteuil (Val-d'Oise) en 1934

Le roi François Ier et la Sainte Tunique d’Argenteuil

Lettre patente de François Ier autorisant les habitants d’Argenteuil à établir des fortifications afin de protéger la « Robe de Notre Seigneur », 1544, ADVO, 12 H 53.
Lettre patente de François Ier autorisant les habitants d’Argenteuil à établir des fortifications afin de protéger la « Robe de Notre Seigneur », 1544, ADVO, 12 H 53.

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Le contexte des guerres de Religion en France

Lors des guerres de Religion au XVIe siècle, la chrétienté européenne se déchire entre ceux qui restent fidèles au culte catholique et ceux qui adhèrent à la Réforme, que l’on appelle plus tard les Protestants, et dont les adeptes français suivent en majorité l’influence calviniste. À cette époque, le culte envers la Sainte Tunique se développe largement. Il y a de plus en plus de processions solennelles au cours desquelles on porte à travers la ville d'Argenteuil la « Sainte Robe » qui prend alors le nom de « Robe de Dieu » ou « Robe-Dieu ».

La procession de 1535 à Paris

Au moment où le protestantisme commence à s’étendre dans le royaume et que notamment les différents clans de la noblesse française choisissent progressivement leur camp, une gigantesque procession a lieu à Paris le 21 janvier 1535. L’objectif de cette grande prière publique et solennelle est « d’attirer la bienveillance divine », au moment où l’agitation due à la réforme protestante, est de plus en plus importante dans le pays. Le roi François Ier avec ses enfants ainsi que de nombreux princes et prélats font partie du cortège exceptionnel où sont « portés la Sainte et Vraie Croix de Notre Seigneur et Rédempteur Jésus Christ » (non encore sortie depuis Saint Louis), « son chapeau d’épines », « le fer de lance dont son côté fut percé », « l’éponge de Notre Seigneur » et « la robbe inconsutile » qu’il a fallu faire venir d’Argenteuil.

Argenteuil et ses fortifications

À plusieurs reprises, les habitants d’Argenteuil avaient demandé la possibilité de fortifier leur ville, mais sans succès. Devant l’importance de la relique et les menaces de plus en plus graves qui pèsent sur elle, François Ier autorise par lettres patentes, le 21 janvier 1544, de « faire clore et fortifier la ville » « tant pour la garde, conservation de leurs personnes et biens, que du lieu et monastère où repose le très sacré et précieux reliquaire de la Robe inconsutile de Notre Sauveur et Rédempteur Jésus-Christ. » Cela répond à « l’humble supplication de nos chers et bien aimés les manants et habitants du lieu et bourg d’Argenteuil-lès-Saint-Denis en France contenant que le dit bourg est assis sur la rivière de Seine près de notre château et forêt de Saint-Germain-en-Laye, de notre bonne ville et cité de Paris et sur le grand chemin de notre pays de Normandie ».

La suite des guerres de Religion à Argenteuil

Ces travaux de fortification, immédiatement entrepris par David Chambellan, écuyer du roi, ne sont toutefois pas vraiment efficaces. En effet, entre 1565 et 1567, la ville d’Argenteuil est prise par les Huguenots : alors que l’armée protestante est défaite par le connétable Anne de Montmorency à Saint-Denis, elle se rabat sur Argenteuil où les Calvinistes pillent la ville, le 12 octobre 1567. L’église d’Argenteuil est totalement ravagée de même que le prieuré ; le reliquaire est détruit et le curé est massacré « en étant pendant à sa fenêtre » par les protestants. Fort heureusement, la Tunique échappe à cette furie, certains témoignages indiquant que c’est le frère Jean Tessier, religieux et sacristain du prieuré, qui la cache. Le reliquaire vide est, lui, dérobé et disparaît, il est remplacé par un reliquaire en bois. Il faut attendre le règne du roi Henri III (1574-1589) pour rétablir l’église, après que le roi ait donné « 10 arpents de bois » et s’y rende ensuite lui-même en pèlerinage. Les fortifications d’Argenteuil sont elles-mêmes démolies au début du XIXe siècle, avant que la Sainte Tunique, après la tourmente révolutionnaire, connaisse par la suite un regain d’intérêt et une nouvelle ferveur.

Nicolas Prévost, Professeur d’histoire-géographie, Service éducatif
Direction des Archives départementales du Val-d’Oise
Janvier 2017

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Fonds d’archives

Archives du prieuré Notre-Dame d’Argenteuil (1195-1789). [12 H 1-69]

Bibliographie

LE QUÉRÉ François, La Sainte Tunique d’Argenteuil, histoire et examen de l’authentique Tunique sans couture de Jésus-Christ. Paris, François-Xavier de Guibert, 1997, 167 p. [BIB 8/3808]

RETHORÉ Edmond, Argenteuil et son passé. Sannois, [s. n.], 1957. [BIB 8/304/1a]