Le château de la Chevrette à Deuil-la-Barre

Le livre à la plus belle reliure de la bibliothèque patrimoniale

LECOY DE LA MARCHE, Albert, Saint Martin. Tours : A. Mame et fils, 1881, 736 p. ADVO, BIB VL4/98, 2020, Cl. R. Chapeau.
LECOY DE LA MARCHE, Albert, Saint Martin. Tours : A. Mame et fils, 1881, 736 p. ADVO, BIB VL4/98, 2020, Cl. J. EPAIN.

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Ce livre d’Albert Lecoy de La Marche est un livre remarquable par sa luxueuse reliure et ses nombreuses illustrations réalisées par des artistes aquarellistes, dessinateurs et graveurs. Cette reliure aux couleurs rouge et or illustrés est une nouveauté pour l'époque.

Bref historique de la reliure en France

Les « moines-lieurs » ont été les premiers ouvriers relieurs au Moyen-Age. Ils employaient pour ce faire toutes sortes de tissus : velours, étoffes de soie, damas, mais le cuir est de tout temps une matière idéale pour recouvrir les livres. Au cours des XII et XIIIe siècles, se forment en France des écoles épiscopales qui aboutissent à la création d’universités dont la plus célèbre établie à Paris par Robert de Sorbon (d’où son nom Sorbonne). Les étudiants ayant grand besoin de livres, une corporation d’artisans du livre est fondée regroupant les parcheminiers, copistes, enlumineurs, relieurs et libraires.

Les premiers essais de dorure sur des reliures datent de la fin du XVe siècle. Pour répondre aux besoins de leur clientèle, les relieurs ont dû trouver une technique de décoration plus rapide que celle à empreintes par petits fers. Ils adoptent celle des grandes plaques. Vers 1480, ce procédé est généralisé en France. Le XVIe siècle apporte une révolution dans la couverture du livre : aux ais de bois (planches) succèdent les plats de cartons. Avec ceux-ci, les reliures gagnent en élégance et en maniabilité pour plaire aux acheteurs de plus en plus nombreux depuis que Gutenberg inventa et popularisa l'imprimerie.

Une reliure originale par sa couleur et sa décoration

Cette remarquable reliure « In-4 », rigide et entièrement décorée est signée dans un médaillon par le relieur, dessinateur et graveur Auguste Souze (1829-1900), un des meilleurs de son temps. Elle est décorée avec des plats en percaline de soie rouge, un décor à encadrement de filets dorés. Le premier plat est orné d’un cartouche central avec une composition noire et dorée représentant saint Martin à cheval découpant son manteau. Dans l’encadrement, sont insérés en lettres dorées et en latin la devise de saint Martin : « NON RECUSO LABOREM » (je ne refuse pas d’accomplir la tâche) et une épithète que la Gaule lui décerna « SCS MARTINUS BELLATOR DNI » (saint Martin le guerrier du Seigneur). Huit médaillons rythment cet encadrement : aux angles sont représentées des monnaies byzantines ; au milieu de chacun des longs côtés se trouve le chrisme en médaillon, monogramme symbolisant la conversion du monde romain, au-dessous duquel dans un petit cartouche est écrit « En TOYTO NIKA » (par ce signe vous vaincrez) ; au centre de chacun des courts côtés est reproduit un recto et un verso de médaille des premiers temps chrétiens.

Le second plat est décoré d'une grande croix ornée des mêmes médaillons. Le dos à six nerfs est orné de cinq médaillons ou chrisme et monnaie sont représentés, le sixième comprenant le titre de l'ouvrage. La tranche est quant à elle entièrement dorée.

Un ouvrage dédié à la vie, au culte, au corps et au siècle de saint Martin

Archiviste, paléographe, professeur à l’Institut catholique de Paris, Richard Albert de La Marche (1839-1897) est l’auteur de nombreuses œuvres dont celle sur saint Martin en 1881. En écrivant la vie du saint (316-397) l’auteur poursuivait un double but : remettre à l’honneur l’hagiographie et montrer le rôle historique et religieux des saints, et leur influence sur la société.

Divisé en deux parties – la vie de saint Martin et le culte de saint Martin –, ce livre de 736 pages est riche en sources et en illustrations : 114 figures, 27 planches dont 6 chromolithographiées. L’auteur a mené des recherches archéologiques, littéraires et sur la société gallo-romaine. Il a apporté un éclaircissement chronologique sur la vie du saint.

Martin, apôtre des Gaules

Martin naît en 316 en Hongrie dans une famille de tribun militaire de l'Empire romain. Il suit la tradition familiale et dès 15 ans il est affecté en garnison en Gaule à Amiens. Un soir de l'hiver 334, le légionnaire Martin partage son manteau avec un pauvre transi de froid. La nuit suivante, le Christ lui apparaît en songe vêtu de ce même manteau. Appelé par la nouvelle foi chrétienne, il quitte l’armée en 336, et se rend auprès de Hilaire, évêque de Poitiers, qui l’instruit dans la religion du Christ et le baptise à Amiens en 339. Il s’installe en 361 sur un domaine gallo-romain près de Poitiers et y crée un petit ermitage et la première communauté de moines en Gaule. C'est dans ce lieu que Martin accomplit ses premiers miracles. Malgré son rang, il mène une vie faite de prières et de jeûne. Il meurt en 397 et est inhumé à Tours dont il est l'évêque depuis 371.
En France, 220 communes portent le nom de Saint-Martin (dont une dans le Val-d’Oise, Saint-Martin du Tertre), 3 700 paroisses lui sont dédicacées et 12 cathédrales lui sont consacrées en Europe. Son nom figure dans des centaines de dictons.


Christine Blazic, 
Service des Publics
Direction des Archives départementales du Val-d'Oise
Septembre 2020


Bibliographie


DEVAUCHELLE, Roger, La reliure en France de ses origines à nos jours. Tome I : Des origines à la fin du XVIIème siècle. Paris : Jean-Rousseau-Girard, 1959, 159 p. [BIB 4/266/1]


DEVAUCHELLE, Roger, La reliure en France de ses origines à nos jours. Tome II : De 1700 à 1850. Paris : Jean-Rousseau-Girard, 1959, 259 p. [BIB 4/266/2]


DEVAUCHELLE, Roger, La reliure en France de ses origines à nos jours. Tome III : Depuis 1850. Paris : Jean-Rousseau-Girard, 1959, 288 p. [BIB 4/266/3]


DUPUY, Achille, Histoire de Saint-Martin, évêque de Tours, contenant l’histoire de sa vie et celle de son culte. Paris : Imprimerie de Ladevèze, 1852, 504 p. [BIB VL 8/169]


MOULIERAC, Jeanne, Saint-Martin, un saint très valdoisien : De Saint-Martin à la Saint-Martin. Saint-Ouen-l’Aumône : Editions du Valhermeil, 94, 01/11/2005, 10-15 p. [REV 161/10]