Située dans une ancienne maison pénitentiaire pour filles datant de 1891, elle-même installée dans un ancien château, l’École de préservation de Cadillac ouvre ses portes en 1905. Elle accueille un nombre important de pupilles de 9 à 15 ans (environ 200). Cette institution fait partie de l’un des trois établissements publics pour jeunes filles de justice (avec Clermont dans l’Oise et Doullens dans la Somme). A l’inverse, les autres institutions similaires relèvent d’initiatives privées ou religieuses.
L’École de préservation de Cadillac accueille uniquement des jeunes filles (13-21 ans), les activités qui leur sont proposées sont principalement liées au textile (couture, lingerie, broderie) et à la tenue du domicile (travaux de jardinage, d’entretien de la basse-cour et d’élevage).
Perçue dès les années 1930 comme un véritable « lieu de maltraitance institutionnelle effrayant », et suite à la mise en place d’une justice spécifique aux mineurs (ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945), cette école est rattachée à la direction de l’éducation surveillée. Ce rattachement entraîne l’arrivée, à la tête du nouvellement nommé Institut public d’éducation surveillée (IPES), de Dominique Riehl (1910-1985) en octobre 1944. Psychologue diplômée et assistante du fameux professeur Lagache, cette dernière vise un « reclassement social des mineures inadaptées » et propose alors de faire évoluer ces jeunes filles dans une ambiance « saine, heureuse, et gaie » avec une organisation la plus proche possible de la « vie réelle », tout en offrant également un encadrement effectué par des « psycho-éducatrices ».
Cependant, malgré une volonté réformatrice, l’innovation tant promue par D. Riehl ne voit jamais le jour à Cadillac, ce qui entraîne la fondation d’un nouvel IPES dans un lieu vierge de tout passé carcéral à Brécourt (Labbeville, Val-d’Oise) et son départ pour celui-ci en 1947. Cadillac continue toutefois d’exister en l’absence de D. Riehl. Néanmoins, le suicide d’une des pensionnaires, Marguerite B. en 1950, s’ajoutant aux polémiques précédentes, entraîne la fermeture définitive par décision administrative en 1952.
A titre de témoignage, une ancienne internée de Cadillac entre 1943 et 1945 écrit ainsi en 1968 à une de ses anciennes éducatrices passée de Cadillac à Brécourt avec qui elle a maintenu une correspondance suivie : "Je relis une de vos anciennes lettres. Dans une, vous m'écrivez que Brécourt est tout différent régime que Cadillac. En effet d'après ce que vous me dites, c'est vraiment mieux. Avant ça n'avait pas de sens, condamner ces jeunes filles leur tirant les meilleures années et vivre comme des animaux sans apprendre comment les gens du dehors vivaient, pas de journaux, pas rien, vous parlez d'une belle éducation que l'on recevait. C'était plutôt pour nous faire devenir pire. Enfin le gouvernement a été assez fin pour s'en rendre compte" [688 W 105].